La marmite
Elles sont rares pour Poil de Carotte, les occasions de se rendre utile à sa famille. Tapi dans un coin, il les attend au passage. Il peut écouter, sans opinion, et, le moment venu, sortir de l'ombre, et, comme une personne réfléchie, qui seule garde toute sa tête au milieu de gens que les passions troublent, prendre en mains la direction des affaires.
Or il devine que madame Lepic a besoin d'un aide intelligent et sûr. Certes, elle ne l'avouera pas, trop fière. L'accord se fera tacitement, et Poil de Carotte devra agir sans être encouragé, sans espérer une récompense.
Il s'y décide.
Du matin au soir, une marmite pend à la crémaillère de la cheminée. L'hiver, où il faut beaucoup d'eau chaude, on la remplit et on la vide souvent, et elle bouillonne sur un grand feu.
L'été, on n'use de son eau qu'après chaque repas, pour laver la vaisselle, et le reste du temps, elle bout sans utilité, avec un petit sifflement continu, tandis que sous son ventre fendillé, deux bûches fument, presque éteintes.