Séance 1 - Mémorisation 1

AUJOURD'HUI, DANS LE MONDE, UN HOMME SUR DIX DOIT SA SURVIE AUX GRANDS BARRAGES

Si tous les fleuves du monde étaient endigués, ils pourraient produire autant d’électricité que douze mille réacteurs atomiques, affirme Édouard Goldsmith, un des pionniers du mouvement écologiste international. Cette hypothèse est bien sûr tout à fait théorique. Cependant, les barrages fournissent aujourd’hui une part considérable de l’énergie mondiale : à peu près le cinquième. Le principe de base de l’hydroélectricité est simple. On stocke l’eau du fleuve dans une retenu artificielle de manière à créer une chute. Puis, grâce à l’installation de turbines, l’énergie dégagée par l’eau est transformée en électricité.

A première vue, cette énergie présente des avantages multiples. D’abord, à la différence du pétrole ou du charbon, elle est renouvelable et ne dégage pas, en principe, de gaz polluants dans l’atmosphère contribuant au réchauffement du climat. De plus, un barrage peut fonctionner plus de un siècle, contre une vingtaine d’années pour une centrale nucléaire. Et il n’y a pas de risque de catastrophe atomique entraînant une contamination radioactive de vastes régions, comme cela a été le cas à Tchernobly en 1986. L’hydro-électricité bénéficie donc de solides atouts.

L’autre grande raison pour laquelle on construit des barrages, c’est l’irrigation. Grâce à eux, on lutte contre la faim dans le monde. Plus de la moitié de la surface émergée de la planète est classée comme terrain aride ou semi-aride. Dans certaines régions du globe, telles que la zone sahélienne mais aussi la Californie, la pluie est si rare qu’il est impossible de pratiquer l’agriculture sans faire venir de l’eau de secteurs plus favorisées. En Asie, le problème est différent. Les agricultures doivent survivre la majeure partie de l’année avec peu ou pas de pluies. Puis, quand vient la mousson, les précipitations sont si torrentielles qu’une bonne partie de l’eau s’écoule directement vers les rivières et la mer, sans profiter aux paysans. En construisant des barrages sur les fleuves, on peut emmagasiner. “Un dixième de la population mondiale mange grâce aux barrages”, explique François Lempérière, directeur général adjoint de GTM Entrepose, une société française qui compte parmi les leaders internationaux du secteur. “En Asie, par exemple, les barrages permettent deux récoltes par an au lieu d’une.”

Dans le monde, 40% des barrages sont réalisés pour l’irrigation, 40% pour l’hydroélectricité. Les autres ouvrages permettent de limiter les dégâts des crues et facilitent la navigation sur les fleuves. La grande aventure des barrages commerce dans les années 30, avec la construction du Hoover sur le Colorado, aux Etats-Unis. Sans l’aménagement du cours du plus grand fleuve du sud-ouest américain, il n’y aurait pas d’agriculture en Californie. Dans de nombreux pays, en particulier l’URSS et le Brésil, des travaux gigantesques sont alors entrepris pour dompter la “houille blanche”. En 1950, on compte déjà sur la planète 5196 ouvrages de plus de quinze mètres, la plupart dans les pays industrialisés. dès lors, partout les grands barrages se multiplient. Huit en 1952, les barrages de plus de quinze mètres sont aujourd’hui plus de 18 000 en Chine.

Combien y a-t-il à l’heure actuelle, de barrages dans le monde ? Les estimations varient entre 100 000 et 300 000, dont 35 000 de plus de quinze mètres. Si on construit autant de barrages, ce n’est pas seulement pour répondre aux besoins des populations, mais aussi à cause de la pression des entreprises qui y trouvent leur profit. Créer en 1928, avec l’envol de ce secteur industriel, la commission internationale des grands barrages assure leur promotion dans le monde entier. Elle ne regroupe pas des entreprises, mais des États.